- L’Economiste: La crise du Covid-19 risque d'impacter sérieusement votre activité. Quelles sont vos prévisions pour ce trimestre, et à plus long terme, si la crise perdure?
- Youssef Chraïbi: Bien évidemment, nous ferons partie des secteurs les plus touchés par cette crise. 90% de notre activité est réalisée avec une Europe en confinement quasi total. Seules quelques activités à distance, comme les sites de e-commerce de produits alimentaires, ou encore la gestion externalisée de rendez-vous dans les centres de santé, sont maintenues, compte tenu de l’incapacité d’assurer des interactions physiques. Toutes les autres sont et seront à très court terme quasiment à l’arrêt. Il est impossible d’établir des prévisions, cela dépend en premier lieu de la durée de la période de confinement en Europe, avant que l’économie puisse repartir. Mais également, de la bonne gestion de cette crise sanitaire au Maroc, afin que l’on puisse retrouver une situation normale. Nous réaliserons un bilan après cette période inédite.
- Des licenciements sont-ils prévisibles?
- Nous connaîtrons, pour la première fois de l’histoire de ce secteur, une baisse notable d’activité. A ce stade, nous ne parlons pas de licenciements massifs. Pour le moment, nous déployons les meilleurs efforts pour maintenir nos emplois, en attendant les mesures d’accompagnement que devrait mettre en place notre gouvernement, pour nous aider à traverser cette crise sans précédent.
- Comment vous organisez-vous, à la fois pour garantir la continuité des opérations, et assurer la protection de vos salariés?
- La priorité actuelle est la mise en place du télétravail, à chaque fois que cela est possible. Nous sommes convaincus que c’est la solution idéale, même si nous devons faire face à des contraintes techniques, comme la rupture de stocks de PC portables, ou l’absence de réseau dans les domiciles de certains collaborateurs, et organisationnelles, liées aux prérogatives de nos donneurs d’ordre. Nous avons commencé à nous organiser en même temps qu’en France, et avant même d’arriver à un éventuel confinement obligatoire au Maroc aussi. Concernant nos collaborateurs qui ne sont pas encore en télétravail, nous avons totalement revu l’organisation des sites de production afin de respecter la distanciation minimum recommandée. Ceci n’est pas simple, compte tenu des aménagements peu flexibles de nos espaces. Sinon, l’intégralité des mesures ont été prises afin de garantir des conditions sanitaires optimales: désinfection quotidienne des locaux, condamnation des espaces communs, suppression des pointages, portes automatiques et ascenseurs, mise à disposition de lingettes désinfectantes pour le matériel de l’ensemble des collaborateurs… Notre priorité ultime est la protection de nos collaborateurs, suivie de celle de leurs emplois. Le secteur compte 80.000 salariés, 110.000 si l’on considère tous les segments de l’offshoring.
- Comment s’est comporté le secteur en 2019?
- Les chiffres du dernier trimestre 2019 ne sont pas encore définitifs. Mais nous avons réalisé une croissance très forte, de 25%, sur les trois premiers trimestres de 2019. Nous devrions ainsi dépasser les 13 milliards de DH de chiffre d’affaires à l’export pour 2019, contre 11 milliards en 2018. Pour 2020, avant cette crise nous tablions sur un taux de croissance supérieur à 15%. A l’heure actuelle, impossible de s’engager sur une nouvelle prévision. Cela dépendra de la durée de la période de confinement, principalement en France, puis de la rigueur générale dans l’application des règles sanitaires au Maroc.